Troi oi!, par Quynh Pham
Dans sa dernière exposition Troi Oi!, Sandrine Llouquet défie une fois encore nos perceptions rationnelles: peinture d’intérieur appliquée sur les vitrines, sculptures en béton représentant des avions miniatures, silhouettes tombant du ciel animées sous Flash, caissons lumineux fait de dessins sur Plexiglass blanc et une video représentant une fourmi et une aile de libellule.
Le dessin a toujours constitué la plus grande part de la production de Sandrine Llouquet, mais l’artiste a démontré à nouveau qu’elle était à l’aise dans divers media. Comme dans ses exposition précédentes, Troi Oi! est un environnement fait de travaux créés chacun en réponse à l’autre. Par exemple, quand la décision de projeter l’animation a été prise, l’artiste décida de peindre directement sur les vitrines pour assombrir la galerie. En outre, ses dessins furent transformés en caissons lumineux pour les rendre plus visibles dans la pièce sombre.
Adapter son travail à l’environnement n’est pas question d’après-coup, mais partie intégrante de son processus artistique. Pour elle, “l’adaptation au lieu et au contexte est une qualité nécessaire non seulement pour vivre au quotidien mais aussi pour l’artiste contemporain”. Le travail de Sandrine Llouquet se développe, intrinsèquement fructueux, prolifère puis s’altére pour devenir part entière de l’environnement.
Rarement rattaché à un seul theme, son travail s’inspire de sources variées, d’éléments de son histoire personnelle aux événements relayés par les medias relevés par “hasard”. Malgré cela, il existe un lien qui semble connecter l’ensemble de son travail : l’idée de transformation. Qu’ils subissent une transformation ou soient déjà métamorphosés, les figures, creatures et objets de son travail apparaissent à l’aise, naturels, même banaux dans leur nouvelle condition.
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Sa pièce video est assez basique du point de vue de ses éléments; un comptoir carrelé, une fourmi et une aile de libellule. Alors que la logique nous dit que la fourmi s’intéresse plutôt à dérober l’aile pour la manger, on ne peut s’empêcher de se demander si en réalité elle n’est pas en train d’essayer de s’envoler. Sandrine Llouquet nous confronte non seulement à notre propre imaginaire, mais aussi aux événements étranges que nous rencontrons dans notre vie quotidienne.
“Troi oi!”, le titre de l’exposition est une expression vietnamienne.
Prononcée en réponse à un événement impromptu, pouvant signifier la frustration, la consternation, la surprise ou le plaisir, cette phrase emphatique est ambigue lorsqu’elle est située hors de tout contexte. Oscillant entre malaise et confort, morosité et optimisme, le travail de Sandrine Llouquet communique de façon poignante la dualité qui sous-tend à la vie.
Quynh Pham